Analyser la culture au miroir de la crise permet de tirer trois enseignements. D’abord, la crise a mis en lumière le fort attachement des Français aux pratiques et aux lieux culturels. En dépit d’importantes disparités géographiques en termes de dépenses et d’équipements, les lieux de culture participent au dynamisme des territoires et contribuent positivement au bien-être des individus. L’absence de prise en compte de ce type d’effets explique la sous-estimation de la contribution de la culture à la richesse nationale.
Ensuite, bien que les acteurs de la culture, publics comme privés, aient été dans leur ensemble préservés et accompagnés par d’importants soutiens publics durant la pandémie, cette dernière a accentué la fragilité économique de certains pans et acteurs culturels, tels que les associations, les petites entreprises, et les établissements dépendant de la sortie.
Enfin, la crise a accéléré un changement de paradigme pour les milieux de la culture, passés progressivement d’une logique de rareté, typique des années 1950 au moment de la fondation du ministère de la Culture, à une logique d’abondance. Le développement du numérique au cours des dernières années a alimenté une baisse des coûts de production et de diffusion, conduisant à densifier la concurrence pour la visibilité des œuvres, des services et des contenus. Cette numérisation s’est accompagnée d’un affaiblissement du niveau de protection des ayants droit et d’une opacité des données exploitées par les fournisseurs de services.
En conséquence, les évolutions liées à la pandémie et l’accélération de la numérisation appellent une refonte des politiques culturelles. Dans cette optique, nous préconisons de suivre trois orientations.
En premier lieu, il est nécessaire de mettre en place un plan « territoires de la culture ». Le plan de relance doit dans ce cadre permettre de rééquilibrer les soutiens publics sur l’ensemble du territoire, tout en accompagnant la sortie du PGE pour les entreprises les plus fragiles et en renforçant le soutien aux associations culturelles.
En deuxième lieu, il est urgent d’adopter et de déployer une véritable stratégie numérique pour la culture. Nous recommandons notamment d’accélérer la modernisation des filières dans le cadre du plan de relance, d’améliorer la formation au numérique des acteurs culturels, de créer une autorité de médiation pour assurer la mise en conformité des contrats avec le droit français, et de mettre en place une commission visant à promouvoir les bonnes pratiques en matière de transparence des données d’activités, d’usages et de leur exploitation.
En troisième lieu, nous appelons à un renforcement du service public de la culture. À cette fin, nous suggérons de centrer le pass culture sur l’apprentissage par la pratique et les offres proposées par les établissements culturels ; d’augmenter les financements et le périmètre d’action d’Arte, afin d’en faire la plateforme culturelle de référence à l’échelle européenne ; de réorienter les subventions publiques vers un meilleur équilibre entre création et diffusion dans le temps des œuvres et des contenus ; et de garantir l’autonomie de l’audiovisuel public par le maintien d’une ressource pérenne affectée. Ces différentes mesures permettraient de consolider l’économie de la culture en France et de contribuer à son rayonnement culturel.
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